mercredi 12 mai 2021

Carnaval 58


En 1957 et en 1958, la municipalité lapalissoise, dirigée à l'époque par Gilbert Barthelot organisa, début mai, un imposant corso de printemps où l'on vit défiler chars fleuris, groupes folkloriques, Gils belges et fanfares bourbonnaises. Sur la photo ci-dessus, prise devant le Monument aux Morts de l'Avenue de la Gare, nous pouvons reconnaître, sur la gauche du Gil, M. Périchon, Président du Syndicat d'Initiatives lapalissois, Lucien Colon, Conseiller général et futur maire de Lapalisse, ainsi que Gilbert Barthelot.



S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com

samedi 8 mai 2021

Août 1944 : la libération de Lapalisse

Située en zone libre, la ville de Lapalisse ne fut occupée par les troupes allemandes qu'au lendemain du débarquement allié en Afrique du Nord le 1o novembre 1942. Les reliquats du 152eme régiment d'infanterie, stationnés depuis plus de deux ans tout contre la gare de Lapalisse-ville (quartier de Montplaisir), furent immédiatement démobilisés. Le 30 novembre 1942, une compagnie de la Feldgendarmerie prit possession du château des Ratz et du château des Vignauds et y demeura jusqu'en août 1944. Au printemps 1943, notre ville connut ses premières actions de résistance ce qui accrut la pression de la Gestapo et de la Milice sur la Cité des Vérités.
 
Le débarquement allié en Provence, le 15 août 1944, précipita les choses. Dans les jours qui suivirent, plusieurs unités allemandes venant du sud passèrent par Lapalisse et foncèrent en direction du Donjon et de Digoin : la population commença véritablement à comprendre que le rapport de force était en train de basculer. Le 20 août au matin, le Maréchal Pétain quitta définitivement Vichy. Peu à peu, les garnisons allemandes de Clermont-Ferrand et de Vichy furent évacuées, la plupart des convois passèrent par notre ville.
Le 24 août, à 19 heures, un convoi allemand qui traversait lentement Lapalisse se heurta à la hauteur du carrefour de l'Hôtel de France à une voiture des FFI venant du Breuil. Une fusillade éclata. Un riverain de 63 ans, Antoine Bichet, fut tué par une balle perdue à l'entrée de la rue Traversière alors que deux jeunes gens d'Isserpent, André Pételet et Georges Grenier furent griévement blessés et conduits à l'hôpital de la ville où ils furent soignés par le docteur Perrin.
Le 25 août, une guerilla s'engagea dans le triangle Lapalisse-Digoin-Moulins contre les colonnes des garnisons allemandes de Clermont-Ferrand et de Vichy qui battaient en retraite en suivant les axes Riom-Gannat-Moulins et Varennes-Lapalisse-Digoin. Le groupement Roussel (Colonel Colliou de l'ex-152e régiment d'infanterie), comptant en son sein une poignée de jeunes lapalissois, porta ses efforts sur ce second axe. De violents combats se déroulèrent à Loddes.

Combats aux portes de Lapalisse : des FFI s'apprêtent à lancer une offensive contre un convoi allemand (Archives départementales de l'Allier)

En fin d'après-midi, le premier détachement américain entra dans Lapalisse. Il s'agissait d'un petit groupe de 14 hommes appartenant à l'Armée de l'Air ayant reçu pour mission de rejoindre le Sud de la France afin de préparer la remontée des forces alliées vers le Nord. En 1994, Robert D. Stelle (Naples - Floride), fit parvenir au Docteur Gréze, alors maire de notre ville, un courrierdans lequel il relata son entrée dans Lapalisse : Nous sommes arrivés à Lapalisse tard dans l'après-midi. Le lieutenant ordonna de s'arrêter aux abords de la ville car personne n'était en vue. Votre charmante ville semblait abandonnée. Le fond de notre carte était déchiré près de Lapalisse, nous avions absolument besoin d'en avoir une autre. Nous nous demandions si les Allemands étaient dans la ville. J'ai mis quelques hommes en faction de chaque côté de la rue pour surveiller les toits et les fenêtres et je remontai la rue. Chacun de nous avait un fusil. Le camion et la jeep suivaient lentement.
Un jeune garçon de 10 ou 11 ans environ passa le coin d'une rue en courant et je l'attrapai par le bras. Je lui dis que j'étais un soldat américain. J'étais son ami. Je lui donnai un bonbon. J'avais besoin d'une carte. Je lui demandai de ma conduire à un magasin où je pourrais en acheter une. Je suis sûr que ce jeune homme était effrayé, mais il accpeta de m'aider et nous sommes entrés tous les deux dans un magasin. J'appelai en criant que j'étais un Américain. Un homme sortit de l'arrière-boutique et je lui dis de nouveau que j'étais un soldat américain. Il sortit en courant dans la rue et cria que nous étions les Américains. La rue se remplit soudainement de tous les habitants de la ville, hommes, femmes, enfants. Ils nous apportèrent du vin, du fromage, du pain et nous sautèrent au cou et nous embrassèrent tous. Tout le monde riait et pleurait à la fois, je ne pourrai jamais l'oublier. C'est mon meilleur souvenir de la guerre. Nous sommes restés la nuit à l'hôtel [l'Hôtel de l'Ecu], deux par chambre. Nous avons pris un bain chaud, le premier depuis longtemps. Nous avons pris le dîner dans la salle à manger et il me semble que le maire, le banquier et le directeur de l'hôtel étaient avec nous. Nous avons eu un petit carré de fromage pour le dessert. J'e n'avais jamais eu de fromage pour le dessert. C'était une bonne surprise. Nous avons récupéré notre camion et notre jeep le lendemain matin dans un parking, derrière un grand mur, et nous sommes partis pour Marseille après bien des poignées de mains, des accolades, des embrassades." (cité dans Info Trente n° 23 - automne 1994).
Le 26 août, à 8h30, l'Etat-major allemand de Clermont-Ferrand traversa Lapalisse. En fin de matinée, Vichy fut libérée par les FFI. Dans l'après-midi, un violent accrochage opposa aux portes de Lapalisse un convoi allemand à plusieurs groupes de partisans : trois camions ennemis et leurs occupants furent totalement anéantis. Le soir, les Allemands décidèrent d'abandonner l'itinéraire Lapalisse-Digoin devenu trop dangereux pour privilégier un itinéraire par Jaligny et Dompierre-sur-Besbre. Les environs de notre ville furent le théâtre de violents accrochages jusqu'au 2 septembre. Les opérations se déplacèrent alors autour de Moulins qui fut libérée le 6 septembre. Durant les derniers jours du mois d'août, un Comité de Libération de neuf membres (Raymond Bécaud, Claude Rousset, Joseph Bel, Gaston Périsse, le Docteur Perrin, Claudius Papon, Alphonse Bletterie, Lucien Colon et Antoine Guy) fut installé à l'Hôtel de Ville en remplacement de la municipalité déchue de Charles Rousset. Le 11 septembre 1944, le nouveau préfet du département de l'Allier délégua l'ensemble des pouvoirs municipaux à ce Comité de Libération et choisit Raymond Bécaud comme maire de notre ville.

Le premier tract de Lapalisse libérée signé par Raymond Bécaud

(Archives de la famille bécaud)
Raymond Bécaud (1913-2000), maire de la Libération Stéphane HUG

mardi 4 mai 2021

Arfeuilles, autopsie d'un déclin

A la fin du XVIIIe siècle, la paroisse d'Arfeuilles comptait près de 3 000 habitants (alors que Lapalisse n'en n'alignait que 1 900). En plus des douze foires annuelles et du marché hebdomadaire du mercredi, le bourg montagnard possédait deux tanneries, douze moulins à écorce ou à chanvre, six moulins à blé, ainsi qu'une vingtaine d'ateliers de sabotiers. Une petite bourgeoisie locale (deux bonnes douzaines de familles d'artisans certes, mais aussi deux notaires, un huissier, un juge, un chirurgien et deux apothicaires) dominait la vie paroisiale. La Révolution prit acte du rayonnement d'Arfeuilles en l'érigeant chef-lieu d'un canton (1791) qui réunissait les communes d'Isserpent, de Châtel-Montagne et de Châtelus. En 1800, le canton arfeuillat fut supprimé, écartelé entre celui de Lapalisse et celui du Mayet-de-Montagne. La vitalité des foires lapalissoises et le succès des ateliers de tissage de notre ville mirent à mal les ateliers des bords du Barbenan.
Bien vite, le bourg d'Arfeuilles s'assoupit, faute d'avoir pu s'inscrire dans la révolution des transports du XIXe siècle. A la fois trop éloigné du tracé rénové de la route royale de Paris à Menton (future Nationale 7) et de la ligne ferroviaire PLM de Roanne à Saint-Germain-des-Fossés, Arfeuilles resta en marge des accélérations du siècle. Pour répondre au déclassement de leur commune, la bourgeoisie d'Arfeuilles soutint la création d'un petit séminaire (qui fonctionna de 1828 à 1847, transformé par la suite en un pensionnat tenu par des Maristes jusqu'en 1878, puis en une Ecole libre qui ferma définitivement ses portes en 1905) et celle d'un hospice fondé en 1863 et dirigé par les soeurs du Bon-Pasteur. Enfin, Arfeuilles, aux avant-postes des terres cristallines de l'ensemble Madeleine-Forez, connu à partir des années 1880  une spectaculaire décrue démographique (2 000 habitants en 1900, 635 au dernier recensement) qui saigna à blanc le monde rural.
 

S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com