vendredi 8 mai 2015

La Guerre de Claude Lafayette, territorial bourbonnais (fin)


Au-delà de ces préoccupations familiales, professionnelles et des démarches qu'il entreprit auprès de quelques compatriotes réputés influents afin d'être démobilisé, l'altérité distendit le réseau social de Lafayette et cela d'autant plus que, passé le mois de Décembre 1915 et son départ de Moulins, ses contacts (hors permissions) avec des Lapalissois devinrent extrêmement rares. A Roanne, Claude Lafayette pouvait encore rendre visite à des cousins de sa femme. A Moulins, en revanche aucun membre de sa famille. Néanmoins, dans ses deux premières villes de casernement, notre homme reçut à l'occasion la visite de quelques connaissances de Lapalisse venus sur les bords de la Loire ou de l'Allier pour affaires. Une fois envoyé dans l'Est, Claude Lafayette se sentit quasiment coupé de ses terres : "Dans ce régiment, nous ne sommes que deux de l'Allier, je suis avec le frère de Piat (M. Piat était buraliste-quincaillier, rue du Commerce à Lapalisse), puis cinq de Roanne ou des environs. Les autres sont Bretons et Parisiens. Tu vois que nous sommes bien mêlés." (Lettre du 6 mai 1916 de Bussy-aux-Bois) A Brienne, il se rapprocha du seul "pays" de la caserne : un nommé Boudaille, natif d'Arfeuilles.

Eloigné des siens, Claude Lafayette trouva, durant les dix derniers mois de son service, un profond  réconfort dans la pratique de la pêche à la ligne, véritable religion lapalissoise. Après plusieurs mois sans pouvoir s'adonner à sa passion favorite, Lafayette, arrivé à Gyé, se précipita sur les  bords de Seine : "Je me suis empressé d'aller à la pêche à la truite. J'ai pêché dans la Seine qui n'est pas plus large dans ces contrées que la Besbre, seulement il y a des endroits où il y a beaucoup d'eau. Comme dans la Besbre, il y a des écluses et de beaux courants. J'ai trouvé dans le pays par hasard un poisson artificiel. C'est une dame qui me l'a vendu 0.75 centimes, son mari est mobilisé. Tu parles si j'étais heureux. Je te dirai aussi que dans ce pays, il n'y a pas beaucoup de pêcheursà la ligne et ils ne se servent pas du poisson artificiel comme chez nous, c'est donc bien le hasard que j'ai trouvé celui-ci. J'ai coupé une branche de noisetier et voilà ma gaule. Je suis parti avec un copain et j'ai pêché toute la soirée et j'ai réussi à prendre trois belles truites qui pesaient deux livres." (Lettre du 13 mars 1916 de Gyé)
Le plus difficile donc pour Claude Lafayette est de se procurer du bon matériel de pêche. La plupart du temps, il demande à son épouse de tout lui envoyer depuis Lapalisse : "Je voudrais que tu m'envoies 2 douzaines d'hameçons Président numéro 9 et 4 racines japonaises. Elles doivent coûter 4 sous pièce et les hameçons 6 sous la douzaine. A ma permission, j'avais pris mes hameçons chez Berthuet, ils doivent avoir aussi des racines japonaises. Tu les prendras pas vertes. Tu les prendras sans couleur, je sais qu'il y en a chez Piat. Tu m'enverras cela dans une lettre." (Lettre su 3 juillet 1916 de Brienne)

Après 22 mois de service, Claude Lafayette put enfin annoncer à son épouse la nouvelle tant attendue : son retour à la maison, via le centre de démobilisation de Falaise en Normandie. (Lettre du 27 janvier 1917). La vie reprit ses droits. En 1919, le temps d'un mandat, Claude Lafayette devint conseiller municipal sur la liste radicale d'Auguste Coche. Notre homme prit sa retraite professionnelle à la fin des années 1920.


S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com
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Tous mes remerciements vont à Mademoiselle Melissa Catti qui a souhaité faire revivre la correspondance de Claude Lafayette. 

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