jeudi 18 juin 2015

Louis Lepine : les premiers pas d'un sous-préfet aux champs

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Louis Lépine est né à Lyon le 6 août 1846, fils de Jean-Baptiste, teneur de livres et de Joachime Vegeramo. Après des études secondaires à Lyon et à Louis-le-Grand, il fréquenta les Universités d'Heidelberg et de Berlin, entre 1867 et 1869. Diplômé de la Faculté de Droit de Paris, il s'engagea en 1870 dans la Garde mobile du Rhône et servit comme sergent-major lors du siège de Belfort. Blessé sous une grêle de balles à Bavilliers, il fut décoré de la Médaille militaire pour sa témérité exceptionnelle et renvoyé dans ses foyers le 26 mars 1873. Il s'établit la même année comme avocat à Lyon (profession qu'il exerça jusqu'en 1877) et devint secrétaire de Milhaud, sénateur du Rhône. L'audacieux sergent Lépine entra dans l'administration et en gravit rapidement les premiers échelons. Ce fut à Lapalisse, que Louis Lépine exerça ses premières responsabilités en tant que sous-préfet (30 décembre 1877 - 28 mars 1879). Dans ses mémoires, Mes souvenirs, Lépine écrivit :
"J'y arrivai sans m'annoncer. Ce n'était pas un El Dorado : à 4 kilomètres de la gare, 1500 âmes agglomérées sur les bords d'un ruisseau, la Bêbre : un relai de poste qui a survécu aux diligences. Au centre du pays, un hôtel ou mieux une auberge. J'y entrai prendre mon premier repas sur une table écartée. Puis je gravis la colline en contournant les soubassements du vieux château de La Palisse, une imposante façade récemment restaurée. La sous-préfecture occupait avec l'église un des côtés du champ de foire. Cela avait dû être une grange, et bien qu'aménagée ce n'était pas encore une habitation confortable, mais c'était propre et il y avait par derrière le classique jardin du curé.

Qu'avais-je à faire dans ce port de mer ? d'abord me documenter; j'entrai donc dans le bureau du secrétaire, un septuagénaire voûté, un profil en casse-noisette, qui mériterait un croquis et je le fis longuement causer. A la suite d'une agitation locale, c'était en 1858, dans le remous de l'attentat d'Orsini, la commission mixte de l'Allier avait décimé le parti républicain. Par fournées on avait expédié les condamnés à Lambessa. Mais ils en étaient revenus la rage au coeur. Le 16 mai avait rafraîchi ces souvenirs parce que mon prédecesseur avait eu la main rude. Comment endormir ces rancoeurs ? Heureusement le député était homme à m'y aider plutôt. Le professeur Cornil était un savant distingué dont un traité sur la tuberculose avait fait la réputation. C'était un collègue et un ami de mon frère. (...) A La Palisse même le conseil municipal était aux mains des royalistes. Mais je pensais trouver la campagne plus malléable et je mis à courir les communes, à conseiller les maires sur les affaires, ce qui était le meilleur moyen de les apprendre. Ils me rendirent mes visites et la glace fut rompue. Le vendredi, jour du marché, je faisais mettre au feu une gigantesque daube, des montagnes de carottes, sans parler d'autres victuailles, et dès 8 heures du matin, tout le jour, je tenais table ouverte où qui se présentait trouvait place. En quittant le foirail, les maires entraient chez moi les sabots à la main, venaient me dire un petit bonjour et allaient s'asseoir à côté des autres. Je faisais concurrence à l'hôtel Sainte-Catherine et sauf l'hôtel tout le monde était enchanté."

Sous-préfecture de Lapalisse 

Lors de son passage à la tête de la sous-préfecture de Lapalisse, Louis Lépine fit état de réelles qualités d'administrateur que le député de l'Allier, Mony, mit en avant pour soutenir sa demande de promotion : "M. Lépine est un excellent sous-préfet, depuis un an qu'il est à Lapalisse, sa compétence dans toutes les questions administratives, son zèle, son aptitude, le tact dont il a fait preuve en maintes occasions délicates, son intelligence et j'ajoute, son talent, de parole, le désignent pour l'avancement. Il n'est assurérement pas à sa place dans une sous-préfecture de 3 eme classe et il a l'étoffe d'un excellent préfet."


Après avoir occupé divers postes préfectoraux en province, Louis Lépine fut nommé préfet de Seine-et-Oise en 1893. Mais suite à la démission de M. Lozé, alors Préfet de Police de Paris, Louis Lépine fut appelé dans la capitale au bout de quelques jours seulement. En 1897, il fut nommé Gouverneur général de l'Algérie avant de réintégrer définitivement la Préfecture de Police parisienne en 1899.
En décembre 1901, il créa la première exposition de jouets et d'articles de Paris qui prit, l'année suivante, l'appelation de Concours Lépine. Ce fameux concours qui se perpétue encore de nos jours a pour but d'encourager et de récompenser la créativité et l'inventivité mises au service des Arts et de l'Industrie. Membre de l'Académie des sciences morales et politique, le célèbre préfet de police parisien décéda à Paris le 10 novembre 1933


S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com

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